Quelle joie de retrouver de bonnes sensations sur une compétition. C'est encore mieux quand ça se passe de nuit, c'est encore plus rigolo quand les sensations se rapprochent de celles de la glisse en ski de fond, non pas dans la neige mais dans la boue. C'est moins drôle quand on se perd en ville. Voilà ce que m'a réservé la première nocturne de ma saison.
La Galonocturne
C'est une compétition organisée par le club voisin et ami de l'Entente Athlétique du Plateau Est (de Rouen). Un trail de 13,5 km et une marche nordique de 10 km au programme. Départ à 19h00 par cette fraiche soirée de novembre, fraiche et humide. Il ne pleut pas mais le terrain est détrempé par les fortes pluies qui se sont accumulées ces derniers jours. Départ et arrivée sur la piste du stade d'athlétisme de Franqueville Saint-Pierre, direction la forêt. Une portion de route, trop longue à mon goût, et on attaque un chemin qui va très vite plonger au fond d'un vallon que nous allons emprunter avant de remonter vers la ville de Belbeuf. Ensuite on redescend, par une autre côte bien pentue, on rattrape le chemin en sens inverse pour aller remonter par la première descente, vers l'arrivée.
Au total, deux grosses descentes et deux grosses montées et un chemin de fond de vallon où l'eau s'est accumulée pour donner la joie de patauger à qui aime ça (j'en fais partie). Sans oublier du bitume pour qui n'aime pas ça (j'en fais partie aussi) avec malheureusement une rallonge dans les rues de Belbeuf en ce qui me concerne, non prévue programme.
Des bonnes sensations retrouvées
J'avais connu les pires sensations un mois plus tôt à l'occasion de la Rolinordik, une autre compétition locale. Voir Performance nullissime fier de moi. J'étais curieux de voir comment j'allais me sentir après le petit épisode de Covid qui s'était révélé à cette occasion. J'essaie de me placer vers l'avant du peloton, 77 participant(e)s inscrits sur la marche nordique dont le départ est donné 10 minutes après celui du trail. Les premières lignes sous l'arche sont déjà occupées. Pas grave : il sera facile de dépasser, si je peux, avant d'attaquer le premier chemin.
C'est parti. Autant j'avais compris dès les premiers hectomètres de la compétition précédente que "ça ne le ferait pas", autant là je peux partir "à donf", sans difficulté. Je suis quand même englué dans le peloton sur les premières dizaines de mètres, un petit groupe a déjà pris le large. Je mets la gomme, sur le bitume, pour tenter de recoller.
Je dépasse pas mal de monde, dont mon pote Dominique du club qui m'encourage au passage et les deux premières féminines. Peu avant l'attaque du chemin, les premiers marcheurs sont à portée, non pas de fusil mais d'un jet de pierre. Bon je ne tire pas, je reste fairplay ce qui n'est pas le cas du marcheur que je dépasse avant d'entrer dans le chemin : lui alterne marche nordique et course à pied. Je ne peux m'empêcher de lui faire remarquer mais ce qui m'importe le plus c'est ma propre marche (et "marche propre"). C'est malheureusement courant dans toutes les compétitions non jugées, y compris parmi les premiers dont beaucoup, sans forcément courir, adoptent une technique qui leur vaudrait d'arriver avec une collection de cartons sur une course officielle, voire ne pas arriver du tout.
Un parcours "fun"
La première descente est raide et piégeuse. Même pas peur, j'y rattrape les deux derniers du groupe de tête. Qu'on est bien dans la forêt, un hibou joue les supporters, trop sympa j'adore ! En bas, c'est gadoue et compagnie dans le vallon. D'énormes flaques et ornières remplies d'eau agrémentent le chemin. On nous a prévenu : inutile de chercher à les éviter, aucune chance de rentrer avec les pieds secs et les chaussures propres. Alors j'y vais tout schuss, droit devant. Quand on n'est pas dans l'eau on est sur la boue, avec des appuis fuyants. Là, on est plus en mode glisse que propulsion mais les bâtons aident bien quand même. Pas la peine d'espérer réaliser une "grosse perf" aujourd’hui ni de conserver une gestuelle idéale. Je dépasse le marcheur devant moi, lui en mode patinage artistique avec quelques belles figures, pour ne pas rester dans un faux rythme. Arrivé à la côte qui remonte du vallon, un regroupement s'opère dans le groupe de tête. Je me sens toujours bien mais impossible de dépasser sur le single.
Errance dans les rues de Belbeuf
Le chemin nous emmène en ville là-haut et nous fait donc retrouver le bitume. Le petit groupe marche de concert quand le premier s'interroge : c'est par où ? Plus d'indication ! On s'arrête, on hésite on se questionne, plusieurs autres compétiteurs rejoignent le groupe des égarés et nous repartons au hasard dans les rues. Nous demandons notre chemin à des automobilistes qui se sont arrêtés. Personne ne sait, ils n'ont pas vu de dossard. Non non, ça ne doit pas être par-là, nous faisons demi-tour, et à un moment donné voyons passer des frontales tout au bout d'une rue sur notre gauche. Aller on fonce vers la lumière pour retrouver la bonne direction ! Nous nous serons ainsi offert 1,7 kilomètres de plus, malheureusement sur du bitume qui me vaudra en plus de casser une pointe de bâton.
Retour du diable vauvert
On retrouve le peloton des marcheurs qui ne se sont pas trompés, mais "c'est mort" pour une place honorable au classement. Pas grave, je suis là pour le plaisir et pour tout donner quand même. A l'amorce de la nouvelle grosse descente dans le vallon, le peloton des marcheurs s'enrichit de celui des trailers, partis 10 minutes plus tôt pour le parcours de 13 ,5 km. Dopé par l'adrénaline secrétée par la vexation de l'erreur, je descends à "tombeau ouvert", en faisant quand même attention de ne pas tomber dedans. Non seulement je ne me retiens pas avec les bâtons, mais je les utilise en poussant pour aller plus vite, juste en pliant un peu genoux pour conserver un bon équilibre mais sans courir (fairplay, toujours !). J'y dépasse de nombreux marcheurs et marcheuses et aussi des trailers, qui ne sentent pas très assurés. Il y a de l'ambiance en bas : une sono avec une musique à fond la caisse pour nous encourager puis plein de monde sur le sentier du retour, trailers et marcheurs, ça c'est très sympa.
J'essaie de marcher aussi vite que les conditions le permettent. Je rattrape encore des marcheuses et marcheurs, des trailers aussi qui ne bénéficient pas de l'aide des bâtons pour tenir debout. La pointe qui manque aux miens n'est pas un handicap dans la boue. Je rattrape aussi Bruno, de mon club, qui me chambre au passage puis Dominique à nouveau. Et aussi Angèle et Christophe, marcheurs nordiques au Stade Sottevillais que j'accompagne temporairement en remplacement d'un coach qui s'est blessé. Angèle m'interpelle : "Mais qu'est-ce que tu fous là ?". Évidemment je me fais aussi dépasser par des coureurs qui "tiennent la route".
Niaque et pas niaque
On attaque la dernière montée, dans laquelle les bâtons m'apportent un gros avantage par rapport aux trailers. J'en laisse encore quelques-uns sur place, dont certains sont à l'agonie, ça me donne des ailes. Puis retour par le sentier du départ et, fort heureusement, on continue sur un autre beau chemin plat et relativement sec. C'est là que la pointe de mon bâton gauche me manque : il a tendance à ripper quand je pousse derrière. Un de mes compagnons d'errance dans les rues de Belbeuf me rattrape et me dépasse. Puis un autre. Je n'ai pas la niaque pour m'accrocher, ma démarche "claudiquante" sur une pointe m'a filé un coup au moral. Juste à l'entrée du stade je dépasse un autre concurrent. Lui il l'a, la niaque : il me redépasse aussitôt, mais pas la chance : il laisse tomber sa gourde et s'arrête un instant pour la ramasser, ce qui me permet de reprendre quelques mètres d'avance.
Sprint final sur la piste d'athlétisme (une ligne droite et un virage avant l'arrivée) : j'accélère, je l'entends revenir juste derrière moi. Ah non pas me faire coiffer sur le fil, je n'ai pas la niaque mais quand même !!! Alors j'en remets une couche pour rester devant in extrémis.
Pas si mal côté perf
Les 10 km se seront donc finalement transformés en 11,7 pour moi (pour le même prix). Ma montre m'indique 7,7 km/h de moyenne, ce dont je me satisfais très largement dans ces conditions. Côté classement, je suis malgré le détour "non buissonnier" remonté à la 10ème place, 2ème dans ma catégorie. Avec un temps officiel de 1h32 et 1,7 km de bonus, ça me va ! Le premier est crédité d'une moyenne de 7,8 km/h. Avec le quart d'heure qu'il nous met dans la vue, lui n'a pas dû se tromper. Angèle et Dominique terminent, eux, premiers de leur catégorie, bravo.
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